Les buts de la traçabilité
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Clairement, il s'agit, après
les diverses crises survenues ces dix dernières années dans la chaîne
alimentaire (la crise de la "dioxine" revient régulièrement dans le texte sous
référence 5° ), de rendre au consommateur la confiance en ce qu'il mange.
Des textes renforçant la responsabilité relative à la sécurité
générale des produits ont bien été votés. Ils ne sont cependant pas suffisants
en cas d'accident.
Les textes définissant la "traçabilité" visent en fait à
faciliter les interventions en cas d'accident découvert en bout, voire en fin
de la chaîne alimentaire ( chez le consommateur ). On se souviendra des mesures
- presque de panique - prises à l'occasion de la "crise de la dioxine".
L'impossibilité de trier rapidement le bon grain de l'ivraie a amené les
autorités à prendre des mesures de blocage de toute la "chaîne du poulet" en
attendant qu'une enquête puisse déterminer exactement lesquels étaient sains et
lesquels ne l'étaient pas. Cette situation a entraîné des pertes financières
énormes pour la filière concernée, . à cause de quelques poulets contaminés par
un peu d'ascarel.
Car, << Lorsqu'une denrée alimentaire dangereuse fait
partie d'un lot ou d'un chargement de denrées alimentaires de la même catégorie
ou correspondant à la même description, il est présumé que la totalité des
denrées alimentaires de ce lot ou chargement sont également dangereuses, [ sauf
preuve du contraire ] >> CEE 178-2002, art 14 § 6. Et, << Lorsque
le produit peut avoir atteint le consommateur, l'exploitant informe les
consommateurs de façon effective, le cas échéant par un communiqué de presse,
et précise des raisons du retrait et, au besoin, rappelle les produits déjà
fournis aux consommateurs lorsque les autres mesures sont insuffisantes pour
atteindre un niveau élevé de protection de la santé. >> AR art 8
§ 2. On appelle cela le "principe de précaution".
Les mesures imposées par la nouvelle législation permettront de
remonter rapidement la filière et de ne retirer du marché que les produits
concernés.
Notons que le "bioterrorism act" de la FDA américaine impose aux
entreprises de fournir la traçabilité des produits concernés dans les 4h (
quatre !! ) de leur requête par l'Administration.
On s'expose à des poursuites pénales, mais tout d'abord il y
aura blocage de toute la production ( principe de précaution ), et demande de
dommages et intérêts - vous savez ce que cela signifie aux USA ! Vous avez
intérêt à vous faire tout petit et à vous faire oublier au fin fond de la forêt
tropicale ...
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Les principes de la traçabilité
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Traçabilité: la capacité de retracer, à travers
toutes les étapes de la production, de la transformation et de la distribution,
le cheminement d'une denrée alimentaire, d'un aliment pour animaux, d'un animal
producteur de denrées alimentaires ou d'une substance destinée à être
incorporée ou susceptible d'être incorporée dans une denrée alimentaire ou un
aliment pour animaux ( Règl (CE) 178/2002 art 3.15 )
Traçabilité: la capacité de
retracer le cheminement d'un produit, à travers toutes les étapes de la
production, de la transformation et de la distribution; ( AR 14 nov 2003, art 2
- 13° ).
Champ d'application: selon les textes en
référence 1° et 2°, les règles de traçabilité ne s'appliquent qu'à
tous les intrants de la chaîne alimentaire humaine.
Ce << que >> est cependant très large,
puisqu'il inclut non seulement toutes les matières premières ( y compris l'eau
et donc les boissons ), mais aussi tous les aliments pour animaux et de toute
substance destinée à être incorporée ou susceptible d'être incorporée dans une
denrée alimentaire ou un aliment pour animaux pouvant entrer dans la chaîne
alimentaire humaine.
Bien entendu, les produits de la chasse et de la pêche sont, eux
aussi, concernés.
Enfin, ce << que >> concerne tous les matériaux qui
entrent en contact avec la chaîne alimentaire humaine: emballages, transports,
etc.
Et le reste ? La lecture du texte en référence 3° laisse
supposer que, tôt ou tard, la traçabilité sera d'application pour d'autres
produits, à commencer sans doute par les jouets.
Quelles sont les entreprises concernées ?
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Toutes les entreprises de production et de transformation
intervenant, à quelque stade que ce soit, dans la chaîne alimentaire humaine.
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Mais aussi les entreprises de transport et de distribution.
Qui, quand, comment ?
-
Ce sont les dirigeants de l'entreprise elle-même qui doivent
prendre la (dure) décision de retirer les produits du marché dès qu'un doute
existe, au besoin suite à une communication avec les autorités, mais pas
nécessairement.
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Pas question d'attendre le flash du radar pour freiner !
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Traçabilité interne et traçabilité externe
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La traçabilité interne consiste à conserver la
liste de tous les intrants et caractéristiques propres à chaque fabrication.
Cette traçabilité est déjà appliquée de longue date dans de
nombreuses entreprises, dans les entreprises agricoles ( qui doivent noter tous
les paramètres et intrants, par exemple de semences et de pulvérisation.), mais
aussi dans les entreprises transformatrices de la chaîne alimentaire. Cette
traçabilité interne permettra de définir les lots de fabrication.
Un lot ou une série de fabrication est un
ensemble homogène de produits: composition ( liste exhaustive des intrants AVEC
leur origine ), processus de fabrication, emballage, conditions logistiques
amont & aval, et les produits côtoyés - par exemple les produits de
nettoyage de machines ou des cuves, ou le matériau dans lequel le produit a été
stocké ( les oenologues savent l'importance du fût ).
La traçabilité externe consiste en la
transmission des informations entre les entreprises d'une même filière. Mais
quelles informations ?
En général, est suffisante la seule transmission du n° du
lot entre un client et son fournisseur. En cas d'accident,
l'Administration remontera tous les maillons de la chaîne, un à un, pour
retrouver le lot défectueux chez le fabricant "fautif", puis redescendra la
chaîne pour connaître tous les numéros des lots des produits à retirer du
marché, comme un généalogiste retrouverait tous les cousins d'une même famille.
D'autres informations doivent dans certains cas
être obligatoirement transmises. Par exemple en cas de présence d'OGM, ou de
composants allergènes ( ne fût-ce que pour une catégorie restreinte de
personnes ), ou d'une manière générale lorsque qu'une caractéristique ou un
composant figurera sur l'étiquette ( par obligation légale ou par simple choix
).
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Implications de la traçabilité externe
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Complexification des bordereaux de livraison:
Sans traçabilité externe, à une ligne de commande d'un même
article correspondait une ligne sur le bordereau de livraison. Avec la
traçabilité externe, à une ligne de commande d'un même article correspondent
désormais, sur le bordereau de livraison, autant de lignes que de lots livrés.
L'informatique devient donc très vite
indispensable pour gérer cette masse d'informations.
Un grand nombre de programmes ERP peuvent fournir la traçabilité
interne. La traçabilité externe est plus difficile à trouver, notamment parce
qu'elle implique une compatibilité entre différents programmes ( celui de
l'entreprise avec les programmes de ses fournisseurs ET avec les programmes de
ses clients ).
Réconciliation documentaire:
Le nouveau sport pour les manutentionnaires sera de réconcilier
les lignes des bordereaux de livraison avec les lots physiques. Vive les
lecteurs de codes-barres !! A ce sujet, vous pourrez obtenir des informations
techniques auprès de ICODIF, gérant des codes EAN pour la Belgique -
http://www.eanbelgilux.be.
Gestion des stocks (amont et aval):
Le fournisseur devra désormais intégrer de nouveaux paramètres
dans la gestion de ses stocks: le temps nécessaire aux manutentionnaires pour
contrôler des numéros de lots différents pour la livraison d'un seul article,
et donc les exigences prévisibles du client pour obtenir un seul lot par
livraison ( cela lui coûtera moins cher dans leurs entrepôts, mais cela coûtera
plus cher si le fournisseur doit chercher dans son stock physique des lots dont
la quantité correspondra le plus à la quantité commandée, s'il veut avoir le
moins possible de "fins de lots" ).
Une nouvelle gestion du risque
Et surtout le risque financier en cas d'accident. Vaut-il mieux
acheter un lot unique plus important chez un fournisseur unique, ou bien varier
les lots ( et peut-être les fournisseurs ) ? De même, vaut-il mieux allonger ou
réduire la taille des lots de production ? L'unicité permettra de réduire le
prix d'achat et certains frais de stockage, mais accroîtra le risque en cas
d'accident chez le fournisseur ou dans le processus de fabrication interne.
Exemple 1: Quid en cas de détection de trace
d'OGM dans la farine de maÏs ou dans le sucre que vous avez produit en continu
pendant toute une saison ? Toute la production issue de l'unité de production
pendant toute la saison devra être retirée du marché, et tous les produits qui
auront incorporé cette farine de maïs ou ce sucre ... Espérons que vous n'avez
pas oublié votre refuge perdu au fond de la forêt équatoriale ...
Exemple 2: Devez-vous acheter votre sucre et/ou
votre farine de maïs, totalement accessoires ( disons qu'ils entrent pour moins
de 1 % dans la composition de votre recette ), pour 6 mois de votre production
? Ou bien vaut-il mieux les acheter par quelques kilos toutes les semaines au
supermarché du coin ? Si des OGM ont contaminé ce sucre ou cette farine de
maïs, c'est VOTRE PRODUIT que l'on retirera des rayons, et c'est VOTRE MARQUE
qui aura droit à une belle (?) campagne de publicité gratuite au journal de 19
heures et en première page des journaux...
A vous de choisir!!!!
Le cas exemplatif des OGM:
Même s'il est caricatural, n' est pas innocent: s'ils sont
généralement interdits de culture dans la CEE, la CEE peut les importer (
notamment des USA et du Canada ). L'étiquetage de vos produits doit mentionner
la présence d'OGM: si la ségrégation n'a pas été strictement respectée (
notamment dans la chaîne logistique ), et s'il y a eu contamination des
produits "garantis" sans OGM, ...
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Le coût de la non-traçabilité
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Pour l'entreprise fautive: au-delà des
poursuites pénales, c'est toute la production qui sera immédiatement retirée du
marché, avec toutes les conséquences financières et commerciales sur l'image de
la marque entre autre.
Et si vous êtes fournisseur de produits semi-finis, ce seront
tous les produits de vos clients qui seront retirés du marché, avec sans doute
des demandes de dommages et intérêts ( vive la forêt tropicale !! ).
Pour les assureurs, inutile de faire un dessin
après le paragraphe précédent.
Pour les pays hors-CEE et hors USA.
Bien que les législations ne soient pas identiques pour la CEE et pour les USA,
la sanction est la même pour les entreprises qui ne respecteront pas les
prescriptions légales se verront tout simplement interdites d'exportation vers
la CEE et/ou vers les USA.
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Une exigence proche, généralisée et inéluctable
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En novembre
dernier, le Roi signait l' "Arrêté royal
relatif à l'autocontrôle, à la notification
obligatoire et à la traçabilité dans la chaîne
alimentaire". Cet A.R.
entrera en vigueur au 1er janvier 2005, à
l'exception de l'article 8, qui est entré en
vigueur le 1er janvier 2004.
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Il est la
transcription, dans notre législation
nationale, du Règlement (CE) No 178/2002 du
Parlement Européen et du Conseil du 28 janvier
2002, établissant les principes généraux et les
prescriptions générales de la législation
alimentaire, instituant l'Autorité européenne de
sécurité des aliments et fixant des procédures
relatives à la sécurité des denrées alimentaires
( 24 pages ).
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Lequel
Règlement fait suite
notamment à la Directive 2001/95/CE du
Parlement Européen et du Conseil du 3 décembre
2001, relative à la sécurité générale des
produits ( 14 pages ).
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Il sera également
intéressant de se reporter à la Directive
2003/89/CE du Parlement Européen et du Conseil
du 10 novembre 2003, modifiant la directive
2000/13/CE en ce qui concerne l'indication des
ingrédients présents dans les denrées
alimentaires ( 4 pages ).
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Le Livre Blanc sur
la Sécurité alimentaire de la
Commission des Communautés Européennes (
Bruxelles, le 12 janvier 2000 COM (1999) 719
final ).
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Notons également
que cette législation est le pendant de
certaines dispositions peu connues prises par la
FDA américaine dans le cadre du "Bioterrorism
Act", applicable aux USA et chez les
fournisseurs des USA à partir de mai 2004 (
dérogation jusque décembre 2004 pour les
entreprises de moins de 500 personnes
).
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Traçabilité
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